Agrivoltaïsme : Tout savoir sur le partage de la valeur 

Par Antoine Nogier

Le contexte :  

Le jeudi 30 mai, plusieurs experts se sont rendus à l’Assemblée nationale pour participer à un groupe de travail trans-partisan lancé par le député Pascal Lecamp. Ce groupe se concentre sur le partage de la valeur et la contractualisation des projets agrivoltaïques. Cet article explore les discussions et réflexions autour de la répartition équitable de la valeur générée par les projets agrivoltaïques, un enjeu crucial pour l’avenir de l’agriculture durable. 

Les participants du groupe de travail

Le groupe de travail, animé par Pascal Lecamp, a réuni des députés tels que Lise Magnier, Pascal Lecamp, Jean-Luc Fugit, Pascal Lavergne, Luc Lamirault, Dominique Potier, ainsi qu’Ugo Batel (Coopération Agricole, FA), Darrell Leroux (FNSEA, FA), André Bernard (CdAF, FA), Carole Mathieu (TSE, FA), Maxime Cumunel (DG de FA), et des représentants de la Fédération Française des Producteurs Agrivoltaïques (FFPA). La séance a été ouverte par Pascal Lecamp, rappelant l’intervention d’Yvan Jarnias sur la nécessité de redistribuer équitablement la valeur des projets agrivoltaïques. 

Sur le juste partage de la valeur 

Comment mesurer le partage de la valeur ? 

La valeur générée par un projet agrivoltaïque se divise traditionnellement entre les revenus agricoles et ceux issus de la production d’électricité

– Les revenus agricoles peuvent être maintenus, dégradés ou améliorés en fonction de la conception du projet.  

– Les revenus issus de la production d’électricité prennent généralement la forme de rentes ou de loyers récurrents, mais peuvent aussi inclure des participations au capital ou des solutions d’autoconsommation. 

La tentation de maximiser les revenus électriques est forte, mais cela peut créer une compétition inégale avec la production alimentaire. Il est donc crucial de privilégier le juste partage de la lumière :  

  • Pour les structures fixes, limiter l’emprise au sol et le taux de couverture est essentiel pour préserver l’activité agricole.  
  • Pour les structures dynamiques, la production photovoltaïque doit parfois s’effacer pour permettre la photosynthèse, un ajustement nécessaire pour maintenir et améliorer la production agricole. 

Les services et externalités 

Les projets agrivoltaïques apportent divers avantages supplémentaires, tels que la stabilité des revenus agricoles face aux aléas climatiques, des économies d’eau significatives, et la réduction de la pénibilité des travaux agricoles. En outre, ces projets peuvent offrir des services directs tels que l’irrigation, le palissage et la mécanisation, améliorant ainsi l’efficacité agricole.  

Cependant, il est important de noter que substituer entièrement le revenu agricole par du revenu électrique peut conduire à l’abandon de l’exploitation agricole, ce qui est contre-productif pour l’objectif de durabilité. 

Les montants en jeu 

La taxe de partage de la valeur territoriale 

D’ici 2050, l’objectif national est d’atteindre 100 GW de capacité solaire, répartis entre toitures, ombrières, centrales au sol et dispositifs agrivoltaïques. En supposant que l’agrivoltaïsme représenterai 60 % de ce volume, soit 60 GWc, la loi APER a fixé une taxe de partage de la valeur territoriale de 17 500 €/MWc, payée une seule fois à l’installation. Pour les projets agrivoltaïques, cela représenterait environ 1 milliard d’euros sur 25 ans, soit environ 40 millions d’euros par an. 

Comparé à la Politique Agricole Commune (PAC) qui représente 9 milliards d’euros par an ou aux budgets des collectivités territoriales de 240 milliards d’euros par an, l’agrivoltaïsme, même s’il constituait une part importante de l’objectif national de la PPE, ne constituerait donc qu’une fraction des aides financières disponibles pour l’agriculture. 

Les Loyers Annuels 

Les loyers annuels pour les projets agrivoltaïques varient selon l’impact de la solution technique retenue, allant de 0 à plusieurs milliers d’euros par hectare. Avec une moyenne de 2000 €/ha/an, le déploiement de 60 GWc d’ici 2050 pourrait concerner environ 100 000 hectares, générant 200 millions d’euros de loyers par an pendant 30 à 40 ans, soit un total cumulé sur ces quatre décennies d’environ 8 milliards d’euros. 

Conclusions et Perspectives 

1. Petits Projets vs Giga Projets : Ne devrait-on pas privilégier plutôt des petits projets, qui bénéficieraient à 10 % des agriculteurs, plutôt que des giga projets profitant seulement à 0,1 % des agriculteurs comme la tendance le dessine actuellement ? 

2. Ciblage spécifique :  L’agrivoltaïsme ne devrait-il pas se concentrer sur des catégories d’agriculture spécifiques et variées, pour maximiser l’impact et la pertinence agronomique des projets ? (NB : la plupart des projets déposées aujourd’hui le sont en élevage, et concentrées sur quelques régions) 

Le débat sur le partage de la valeur des projets agrivoltaïques est crucial pour l’avenir de l’agriculture durable en France. Les décisions prises aujourd’hui auront un impact durable sur la répartition des revenus et la viabilité des exploitations agricoles.  

Le rendez-vous est donné pour poursuivre cette réflexion. Ne manquez pas notre prochain article : "Quelle est la valeur et le modèle économique d’un projet agrivoltaïque ?". Nous y explorerons en détail les aspects économiques et les différents modèles financiers qui sous-tendent les projets agrivoltaïques. 

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